Passer son temps à se reconstruire, années après années. A se reconstruire une vie, à se reconstruire soi-même avant tout. Passer son temps à se reconstruire, mais surtout prendre son temps pour le faire. Se répéter avec un accent italien empli de candeur que la vie est belle après tout, même sans trop y croire. Mais se le dire, s’en persuader. Pour oublier ses aspects rugueux qui écorchent la peau et les organes internes. Ses irrégularités qui égratignent le corps, le cœur et l’esprit.
Jours après jours, semaines après mois, après années, rebâtir sa pyramide de Maslow dévastée ; retrouver une certaine confiance en soi, un besoin de se sentir aimé, de compter pour quelqu’un. Et puis se jurer, qu’ô grand jamais personne ne nous fera plus jamais de mal. Que personne ne nous fera plus souffrir. Le fait d’avoir souffert pour plusieurs et pendant plusieurs années rend bien moins tolérant à la violence psychologique. Le fait d’avoir assez donné de sa personne pour sentir qu’une peine plus grande qu’une autre pourra nous briser, à jamais.
Alors petit à petit on se sent mieux. Pas encore forcément bien, mais déjà mieux. On commence à pouvoir regarder les autres en face et les voir autrement que des ennemis destinés à nous rendre la vie détestable. On se surprend à sourire, rire même. En se forçant au début, puis en prenant le pli, le faisant par réflexe défensif et – se rendant compte qu’il est bien mieux vu qu’un hochement de tête approbateur – on finit par l’adopter, par habitude plus que par véritable envie.
Et puis vint le jour où l’on se croit prêt. Prêt à profiter de la vie, comme tous ces insouciants qui courent les rues et les jardins. Prêt à vouloir refermer les blessures du passé, prêt à les laisser au fond du placard en se disant qu’elles n’étaient que de mauvais rêves. Se dire que finalement la vie vaut peut-être le coup d’être vécue et balayer d’un revers de la main ce qui servait encore pourtant à nous faire prendre compte des erreurs passées pour ne plus les commettre par la suite. Ne jamais faire confiance aux Autres, jamais.
Mais on recommence, on se laisse vivre, on se laisse avoir donc. C’est là que l’on se rend compte qu’on ne pourra jamais être de nouveau prêt. S’abaisser à vouloir être heureux n’est ni plus ni moins qu’un piège monté de toutes pièces par les aléas de la vie. Faire confiance à quelqu’un, quel qu’il soit, n’est au final qu’un lancement d’un compte à rebours de bombe qui ne préviendra jamais quand il fera exploser votre vie, vos espoirs et vos perspectives d’un avenir heureux.