Mois: octobre 2008

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J’ai toujours vécu dans cette ambiance si particulière mais qui m’est pourtant si courante que je n’y fais plus attention. Ce luxe éclatant, ces beaux appartements, ces sacs en édition limité et ces garde-robes dignes d’une Gabrielle Solis. Avoir tout ça à portée de mains et côtoyer ces richesses extérieurs tous les jours ont fait entrer en moi un cercle plus que vicieux. Plus qu’humain. Je ne peux pas passer près d’un sans papiers avec son chien ou son chat sans sentir une lame me transpercer le cœur. Tant d’inégalités que personne ne résoudra jamais. Une culpabilité aussi, d’avoir tant alors que lui n’a que si peu. Tous les matins en me rendant au travail je vois à la sortie de ma station de métro le même clochard comme certains pourraient sans doute l’appeler ; je déteste cette appellation, ça pue l’aspect hautain et je m’en foutiste à plein nez. Il fait de plus en plus froid et il est toujours là, du matin ou soir en me disant Bonjour Madmoiselle le matin et Bonne Soirée Madmoiselle le soir. Ca me crève le cœur de l’entendre me parler, de savoir qu’il y a un fossé entre nous qui ne pourra jamais être franchi. Alors de temps en temps je descends à la cafétéria de mon boulot, j’achète un café et quelque chose à manger et je les lui apporte. Son sourire est le plus beau de tous les cadeaux que l’on pourrait me faire, de tous ces sacs que l’on pourrait m’offrir et de tous ces bijoux qui ornent mes poignets.

Chai pas moi mais faut qu’ça bouge

Un peu d’optimisme. C’est tout ce qu’on demande après tout. Un chapeau de paille et une brouette ne sont pas uniquement faits pour transporter un cadavre ; voir la vie en noir a ses défauts et ce n’est pas toujours tout rose. Un bon livre, des amis proches, le tout sans faire de prosélytisme. Et puis arrêtons de couvrir la vie de ses plus beaux mots doux en la décrivant comme sophistiquée alambiquée juste compliquée. Le tout est de ne pas avoir de vision systémique, à défaut d’être manichéen comme bien d’autres l’ont été avant nous. Réduire la vie à un monde de couleurs, où tout est beau, magnifique et affreusement blasant n’est pas une vérité ; le contraire ne l’est pas non plus. Il faut prendre un peu d’air tu vois, du recul, se contenter de sa propre vie parce qu’elle ne changera que si l’on s’en donne les moyens, elle ne changera qu’avec un minimum d’ambition et d’envie, justement, de changement.

Tu ne peux pas continuer à voir tout en rose, je ne peux plus continuer à voir tout en noir.

Voir la vie belle, c’est être aveugle, négationniste voire complètement heureux. Alors en ce cas évidemment que la vie puisse être belle puisqu’on ne prend en compte que la sienne et aucune main invisible au monde ne pourra remettre d’aplomb ce système bien plus bancal qu’il n’y paraît. Alors on s’enfonce de plus en plus dans de faux semblants à des allures tellement véritables qu’elles feraient passer un homme intelligent et cultivé pour un humain inapte aux yeux d’un dément.
A l’opposé voir une vie comme je la vois moi n’a aucun intérêt si ce n’est penser que la société dans laquelle tu vis toi ne peut être qu’une société débridée sans apports, sans joies et sans absence de douleurs. C’est ignorer sempiternellement les espoirs de l’aristocratie ambiante et baisser les bras devant une quelconque amélioration tout en levant les yeux en guise de provocation.

Le juste milieu à trouver ne peut l’être que par ceux ayant un prosaïque bon sens ; trop réfléchir amène à trop de questionnements, trop de remises en question et trop peu de réponses. Etre optimiste ou pessimiste et donner du mou à ses idées en cherchant le juste milieu équitable équivaudrait à perdre du terrain, à se laisser gagner par l’adversaire ; chose inavouable et invraisemblable qui poussera toujours la communauté à se diviser, se déchirer, s’entretuer, débattre, tergiverser et confronter les opinions. Une vie sans opinions divergentes serait magnifique et complètement blasant, donc totalement inefficace et irréfléchi.

Sainte Mort

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Ce midi je suis allée au cimetière. Activité joyeuse s’il en est. Je suis allée au cimetière de Paris ; au Père-Lachaise. Je n’avais strictement aucun but pour y aller, si ce n’est y aller. Je finissais de lire un énième livre de Sade le long du trajet pour ressortir à l’extérieur et affronter l’air vif d’un cimetière presque désert. J’ai toujours aimé cette atmosphère si particulière qui diffère tant si celui-ci abrite une de nos connaissances ou non. Ce calme ambiant qui fait frétiller les feuilles orangées d’un automne qui commence entre les pierres tombales. L’automne est presque la bonne saison pour aller dans un tel lieu. L’été est exclus ; synonyme de bonheur, de chaleur, quelle hérésie que de venir ici en cette saison admirer les feux follets d’un amour éteint ou d’une vengeance réussie. Le printemps équivaut à une renaissance de toutes parts ; provocation tellement flagrante devant des tombeaux qu’elle en devient presque indécente. Au final l’automne, qui voit la Nature périr à petit feu, ne connaît son bonheur qu’au milieu de l’hiver, où tout est mort, tout est timide et puissant à la fois, comme le froid invisible qui entraîne si facilement la Mort de ceux qui rôdent trop près des cimetières, dans les rues, trop proches de la Terre pour être les premiers à la pénétrer de l’intérieur.

Impossible de se sentir en vie si l’on ne pense pas que l’on mourra un jour.

Le dire c’est bien, mais encore faut-il comprendre cette phrase à son juste titre.
Notre vie est caractérisée par des jours se suivant, toujours les mêmes, qui défilent sans discontinuer et sans faire preuve de beaucoup d’inventivité. Alors on finit, bon gré, mal gré, par ne plus vraiment y faire attention. On peut néanmoins distinguer plusieurs catégories de personnes, trois selon moi mais sûrement beaucoup plus en réalité.
Tout d’abord ceux qui ne pensent qu’à leur mort, jour après jour, qui se voient mourir de multiples façons, qui s’imaginent que leur fin est proche et que chaque jour en plus est, en fin de compte, un jour en moins. Ceux qui y ont pensé mais qui ne s’en font pas plus que ça ; ces mêmes gens qui vivent en en faisant abstraction mais qui ont tout de même une légère ombre qui leur entoure les épaules. Et il y a aussi cette troisième catégorie, catégorie dans laquelle je crois faire partie, la catégorie de ceux qui savent que la Mort est là mais qui s’en soucient comme d’une guigne. Ce n’est pas une fin en soi, juste une fin de soi, alors pourquoi y penser maintenant, pourquoi y penser d’ailleurs ? Je pense à la Mort en général, mais jamais à la mienne.

C’est maintenant que l’on peut au mieux comprendre cette phrase de Jostein Gaarder : « Impossible de se sentir en vie si l’on ne pense pas que l’on mourra un jour. » ; Comment profiter de la vie si on ignore que cette dernière aura une fin ? Ce serait comme regarder un échange de tennis tout en sachant qu’il n’y aura jamais aucune issue, ce qui rendrait cela bien négligeable et annulerait tout l’intérêt porté à cette action. Pour vivre, y prendre plaisir et ne pas être lassé, il faudrait prendre conscience de sa finalité et de toutes ses externalités négatives. D’un autre côté, ceux qui croient en une vie après la Mort, attendront cette « vie », méritée selon eux, et ne feront rien de leur vie présente, préférant se noyer dans leurs rêves et leurs espoirs d’un monde sans défauts, sans ennuis … totalement inintéressant en somme.

Il en est de même pour celui ou celle qui préférera se réfugier dans son monde tout fait, son monde irréel, son monde rêvé ou son monde virtuel, en se bornant à ses propres limites, quitte à mettre de côté les plaisirs naturels, les plaisirs réels. Mais ce n’est pas ça une vie. Etre vivant c’est se sentir évoluer, se savoir épanouir, et plus qu’aimer les autres, commencer à s’aimer car l’un ne pourra jamais aller sans l’autre.

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Je les voyais tous dans leur léthargie de début de matinée, tous meurtris par le sommeil, car à peine une heure auparavant ils se réveillaient, maudissant leur réveil de leur rappeler ce jour comme étant un lundi et indiquant le début de la semaine. Pendant tout le temps du trajet les regards se croisaient et se décroisaient, ils jetaient l’un après l’autre des yeux vides en direction des fenêtres, de la route, du paysage urbain et des voies ferrées qui n’en finissaient pas de filer. Ce paysage a beau être le même tous les matins ça ne les empêchait pas de le fixer comme s’ils le découvraient pour la première fois.

La gare d’arrivée n’était plus très loin maintenant et ça commençait sérieusement à faire frissonner les voyageurs quotidiens ; les montres n’ont jamais autant attiré le regard et les sacs des femmes d’affaire en devenir n’ont jamais été aussi fermés depuis le départ, comme prêts à affronter le monde sans pitié qu’est celui auquel les « autres » appartiennent. Et je les vois tous là, plus que de les voir, je les regarde et les observe ; je les observe se lever avec frénésie alors qu’il nous reste encore plusieurs centaines de mètres avant d’arriver à destination. Mais non leur envie est la plus forte, l’envie de sortir en premier de cet endroit calme pour pouvoir, enfin, retourner travailler entourés de tous ces gens pressés qui attrapent les journaux gratuits au passage et les jettent dans la poubelle à deux pas de là. Ils se placent tous dans l’allée centrale et devant la porte en actionnant la poignée tout en attendant que le train finisse par s’arrêter et les portes s’ouvrir pour enfin les libérer. Tout cela pendant que je regarde ce petit monde se compacter jusqu’à son paroxysme pour finalement se disperser par petits éléments indépendants qui iront attendre impatiemment sur les escalators en maudissant ceux qui ne sont pas aussi pressés qu’eux. C’est à ces heures là, aux environs de 8 heures, voire encore 9 heures du matin que l’on peut mesurer à son plus fort taux l’égoïsme urbain, les maux qui s’en dégagent et qui gangrènent les individus, ces envies de ne pas perdre de temps au risque de ne rien gagner non plus.

Violence Perverse

Violence perverse, c’est ainsi que l’on nomme le harcèlement sexuel.
Je feuilletais un livre dont le nom m’avait tout de suite sauté aux yeux « Le Harcèlement moral : la violence perverse au quotidien». Ce n’est pas tant le titre qui m’a attirée mais plutôt le fait que l’on fasse un livre brut, tel quel, sur le sujet. Alors plutôt que de vraiment le survoler dans les grandes lignes, ce qui est tentant mais ne sert à rien, j’ai lu la quatrième de couv. Et là où je pensais que ce harcèlement ne s’appliquait qu’au monde du travail ; comme il est souvent question dans les médias, cet outil de paranoïa indispensable ; celui-ci s’applique aussi en famille, en couple, entre « amis ». Je ne peux parler du sujet aussi clairement et honnêtement  que si j’avais lu le livre mais je ne peux pas non plus m’empêcher d’y penser et d’avoir envie d’en parler.
Chose que je ferais peut-être, si j’achète le livre, peut-être, et que je le lis, sûrement.