Les mots sont inutiles. Ils ne sont représentatifs des sentiments des seules personnes qui les disent ou écrivent. Ceux qui les lisent ou les écoutent ne pourront jamais être aussi touchés que ceux qui les laissent échapper. Ils sont donc, non pas inutiles comme je l’ai dit précédemment, mais à double tranchant et diablement inefficaces quand on touche à l’affect.
J’ai eu cette illumination bien tardive en recevant la semaine passée des mots tendres, touchants, superbes, mais qui me passaient au-dessus de la tête car je ne me sentais pas concernée. Cela m’était déjà arrivé à maintes occasions mais sans que je ne me pose véritablement la question de leur utilité et de leur pertinence. Cette prise de conscience fonctionne dans les deux sens. Tous les mots que j’ai pu dire et continue à mon grand malheur de penser, ne seront jamais compris à leur valeur par celui à qui je les destine. Plus que de la déception, on peut parler à juste titre de frustration.
L’homme a beau se vouloir sympathique envers autrui, il n’en reste moins inapte à se mettre dans des situations « étrangères ». A quoi bon parler, à quoi bon écrire, si l’on reste incompris ? Car même en restant incompris, les personnes qui seront avec vous les plus sympathiques et agréables vous donneront l’impression du contraire, celle de vous sentir compris ; réaction encore plus dangereuse, mais après tout celle que l’on attend le plus. Perfidie ou sympathie que de faire croire qu’on comprend des sentiments qui ne nous touchent pas, même s’ils nous concernent par extension ? Bien qu’ayant un côté pessimiste bien affirmé, je préfère pencher pour de la sympathie. Je n’ai pas encore perdu tout espoir en ce qui concerne l’espèce humaine et continue de penser, sans doute avec naïveté, que ces réactions ne sont que positives. En partant tout de même du principe qu’elles sont mensongères et construites de toute pièce. Mais peut-être pensé-je cela car je suis incapable de me mettre à la place des autres, et que je résume à moi toute seule tout le désespoir et le pessimisme que j’imagine universels…